Comprendre l'évaluation selon la pédagogie de l'intégration...


Soussi Samir (?) [20 msg envoyés ]
Publié le:2011-04-12 23:13:41 Lu :6385 fois
Rubrique :Etudes littéraires et questions pédagogiques  

Xavier Roegiers, avril 2011
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Réponse N°11 10044

Voilà un résumé condensé de l'évaluation des compétences.
Par Idoubiya Rachid(Inspecteur)le 2011-04-12 23:51:22



Voilà un résumé condensé de l'évaluation des compétences. Voir référence:

L'évaluation des compétences à travers des situations complexes

La formation des enseignants en Europe, Bruxelles : De Boeck, pp. 231-241 / GERARD, F.-M. / 2010

1. Nécessité et difficultés

L'approche par les compétences vise à rendre les élèves capables de mobiliser leurs savoirs et savoir-faire pour résoudre des situations-problèmes. L'évaluation des acquis des élèves proposent une ou des situations complexes, appartenant à la famille de situations définie par la compétence. L'élaboration, l'utilisation et la validation de tels outils ne sont pas sans difficultés : Une évaluation par situations complexes exigent de la part des élèves une production elle-même complexe et flexible, non réductible à une seule et unique démarche ni à un seul et unique produit ; L'équivalence des situations, leur appartenance à une même famille de situations, n'est évidente ni au moment de leur construction ni pour leur validation, d'autant plus que face à certains problèmes, il n'existe pas d'algorithmes de résolution. La situation est complexe et nécessite une véritable compétence pour pouvoir la résoudre, celle d'analyser la situation, d'identifier et de mobiliser des ressources pertinentes et de les articuler entre elles de manière inédite, ponctuelle et éphémère et souvent propre à chaque individu ; Les exigences de validité et de fiabilité des épreuves d'évaluation nécessitent de prendre en compte la représentativité de l'échantillon des questions par rapport à l'univers de référence, C'est sur la base de ces quelques situations qu'il faudra considérer si l'élève est capable ou non de résoudre toutes les situations de la famille de situations ; L'évaluation par situations complexes entraîne d'autres manières de corriger et de communiquer l'information. La qualité première d'un outil d'évaluation doit être sa pertinence par rapport au système dans lequel il s'insère. Tout dispositif d'évaluation de compétences par des situations complexes devrait d'abord s'assurer que les élèves ont réellement appris à résoudre des situations appartenant à la famille de situations visée. Situations complexes = travail systématique : d'analyse de la situation, d'émission d'hypothèses de résolution, d'identification des ressources pertinentes, de mobilisation et de mise en œuvre de celles-ci pour résoudre la situation. L'évaluation des compétences par des situations complexes ne peut avoir lieu que si un apprentissage systématique de ce type de résolution est préalablement réalisé.

2. Une méthodologie pour l'élaboration des épreuves

Associer à chaque compétence les ressources (savoirs et savoir-faire) qui peuvent être mobilisées lors de sa mise en œuvre. Ces ressources correspondent le plus souvent aux objectifs qui figurent dans les programmes fondés sur la pédagogie par objectifs, mais ils sont réorganisés en fonction des compétences. Elaborer 2 ou 3 situations qui illustrent la famille de situations susceptibles d'être résolues par l'élève maîtrisant la compétence. Ce n'est que sur la base de ces situations concrètes qu'on dégage les paramètres de la famille des situations, c'est-à-dire les éléments communs à toutes les situations de la famille. Ces paramètres concernent l'univers de référence en termes de ressources, Le type de situations, le type et le nombre de supports, le type de tche attendue, les conditions de résolution, le type de critères utilisés pour évaluer la production... Les paramètres de la famille de situations ne se limitent donc pas aux connaissances ou aux procédures à mobiliser, mais reprennent toute une série d'éléments qui devraient permettre à d'autres concepteurs d'élaborer de nouvelles situations, considérées comme équivalentes ;

Savoirs : constituants de l'atome, classification des éléments, réactions chimiques, formules et équations, solutions, électrochimie, hydrocarbures, polymérisation et polymères, pollution ... Savoir-faire : Exploiter les différents types de supports, trier les informations, les traiter ; analyser ; déduire, communiquer par écrit (et/ou oral), tracer des courbes, des schémas et des diagrammes..., réaliser des activités expérimentales en utilisant un protocole. Savoir-être : se comporter positivement envers l'environnement, avoir un sens critique, être autonome.

Type de situations : Situation-problème liée à la vie quotidienne, environnementale (urbaine et/ou rurale) technologique ou industrielle et au travail au laboratoire, pollution, dégradation des sols, alimentation, polymères, etc., faisant intervenir l'exploitation d'un ou de plusieurs supports nécessitant d'identifier un problème et de le résoudre.

Type et nombre de supports : Texte, photo, schéma et tableau. Nombre : entre 2 et 4 ...

Type de tche attendue : Identifier un problème, exploiter un document, un graphe..., traiter des résultats expérimentaux, et résoudre le problème. Conditions de résolution : Temps : 30 minutes ; Travail individuel en classe ou au laboratoire. Critères utilisés pour évaluer la production : I- Critères minimaux: 1. Adéquation de la production de l'élève à la situation. 2. Utilisation correcte des outils de la discipline ; 3. Cohérence de la production de l'élève. II- Critère de perfectionnement : 4. Qualité de la présentation de la production de l'élève.

Sur la base de ces paramètres, les épreuves d'évaluation sont élaborées en veillant d'une part à ce que les situations respectent les paramètres de la famille de situations et puissent donc être considérées comme équivalentes les unes aux autres et d'autre part à ce que la règle dite des deux tiers soit respectée ; Les critères d'évaluation sont détaillés pour chaque situation en indicateurs sur la base desquels un barème de notation est élaboré consistant avant tout à déterminer quand le critère sera ou non considéré comme maîtrisé ; Chaque situation d'évaluation est préexpérimentée auprès de quelques élèves, essentiellement à des fins de régulation, et ensuite expérimentée dans un échantillon représentatif afin de permettre sa validation empirique ; À côté de ces épreuves «compétences» fondées sur des situations complexes, des épreuves «ressources» semblables aux épreuves classiques sont également élaborées pour accroître l'acceptabilité de l'évaluation et en accroître le sens : Si un élève ne parvient pas à résoudre une situation complexe, il est important de savoir si cela est lié au fait qu'il ne maîtrise pas les ressources à mobiliser ou qu'il ne parvient pas à les mobiliser ni à les intégrer pour résoudre la situation-problème.

3. Quelques étapes-clés

3.1 La définition des paramètres de la famille de situations : Ce travail permet de délimiter de manière concrète et précise quelle est la famille de situations concernée par la compétence. La précision des paramètres de la famille de situations détermine sa qualité.

3.2 La définition des critères d'évaluation : Les critères d'évaluation sont un des paramètres essentiels car c'est à travers eux que toutes les situations relatives à la compétence vont être analysées. Un critère est un point de vue auquel on se place pour évaluer un objet, une qualité attendue de celui-ci. Les critères doivent permettre d'évaluer la production de l'élève, c'est-à-dire «d'en faire sortir la valeur» Il est indispensable que ces critères soient indépendants l'un de l'autre afin de ne pas

évaluer deux fois la même chose. Une liste de critères qui seraient pertinents et exhaustifs pour toutes les disciplines et tous les niveaux est impossible d'identifier. - Mais quelques critères auxquels on peut se référer : La pertinence, ou adéquation de la production à la situation : pas hors sujet ; La correction ou utilisation correcte des concepts et des outils de la discipline : orthographe correcte, utilisation correcte des techniques de calculs, exactitude scientifique d'une justification; La cohérence : l'utilisation d'une démarche logique sans contradiction interne ( le choix cohérent des outils, l'enchaînement logique de ceux-ci, l'unité de sens de la production ) ; La complétude : le caractère complet de la réponse ; La qualité de la langue : pour les disciplines non littéraires ; La qualité de la présentation du travail, de la copie de l'élève ; L'utilité sociale ou la profondeur des propositions émises : l'analyse de problèmes sociaux, historiques, géopolitiques, d'environnement... ; L'originalité de la production, spécialement pour les disciplines littéraires ou sociales ; La liste des critères découle toujours d'un choix effectué en fonction des objectifs des évaluateurs des accents qu'ils souhaitent mettre.

3.3 La définition et la gestion des indicateurs :

L'évaluation critériée est complexe : tourne finalement autour des indicateurs et de ce que l'on décide de faire avec eux. Si le critère est général et abstrait, l'indicateur est contextualisé et concret. C'est lui qui - dans la production de l'élève - apporte de l'information sur sa maîtrise de la compétence. Ce que l'on évalue, c'est la maîtrise du critère, non pas la maîtrise de l'indicateur. Celui-ci n'est qu'un élément parmi d'autres qui permet à l'évaluateur d'estimer, d'apprécier le degré de maîtrise du critère. Un indicateur ne devrait jamais être un «indicateur minimal» qui devrait absolument être présent pour décider de la maîtrise du critère. Comment passer de l'identification et de l'analyse des indicateurs à l'appréciation du critère... Il faut néanmoins éviter de déboucher sur un système infaisable, parce que trop difficile à gérer par les correcteurs. S'ils doivent tout le temps se référer à leur grille de correction, à leur barème, on peut être sûr que très rapidement, ils ne le feront plus... et finiront par revenir à une évaluation classique. L'expérience nous a montré que l'acte de correction d'épreuves constituées de situations complexes est une opération difficile et reste fortement influencé par la personnalité, les valeurs et l'histoire des correcteurs.

Lors de la correction d'épreuves classiques constituées d'items, il suffit de constater si la réponse est exacte ou non. On fait ensuite la somme du nombre de points attribués à chaque item réussi pour obtenir la note finale. Le seul critère utilisé, de manière plus ou moins implicite, est «l'exactitude de la réponse» et la réponse à chaque item peut être évaluée de manière séparée. L'évaluation critériée d'une production complexe nécessite de la part des correcteurs une sorte de révolution culturelle dans la manière de considérer les copies des élèves. Notamment, on a pu constater la difficulté des correcteurs à préserver l'indépendance des critères. Ils acceptent facilement d'utiliser des critères qui portent sur des dimensions différentes, mais cette utilisation n'est pas toujours cohérente dans la mesure où ce n'est pas toujours le même critère qui prime.

La «logique» de nombreux correcteurs est, malheureusement, de privilégier ce qui pénalise l'élève, alors que la logique critériée de l'évaluation, surtout en termes de certification, devrait être au contraire de privilégier les réussites des élèves. Ce travail de définition et de gestion des indicateurs est fondamental, car il permet de réguler les exigences attendues dans le cadre de l'approche par les compétences. En effet, si l'approche par les compétences de base poursuit explicitement des objectifs d'équité, elle place la barre très haut en termes pédagogiques : d'une part, elle se situe aux niveaux taxonomiques les plus élevés : la mobilisation et la résolution de problèmes sont les deux niveaux supérieurs de la taxonomie des opérations cognitives proposées par D'Hainaut (1983) ; d'autre part, elle établit un seuil de réussite élevé puisque elle conduit à ne considérer qu'une compétence est maîtrisée que lorsque tous les critères minimaux sont maîtrisés, la réussite dans une discipline étant liée à la maîtrise de toutes les compétences et la réussite d'une année ou d'un cycle scolaire devant se fonder sur la réussite dans toutes les disciplines... ; Il faut donc un peu de souplesse quelque part. Cela peut se faire principalement dans la définition des indicateurs et dans leur gestion définie au sein d'un barème de notation et concrètement utilisée au moment de la correction. Il ne s'agit pas d'être laxiste, mais de définir des seuils de réussite suffisamment souples et d'orienter le processus de correction vers la valorisation de ce qui a été réussi plutôt que vers la sanction de ce qui a été raté.

Conclusion:

Pour des pays ayant inscrit leur système éducatif dans la perspective de l'approche par les compétences, l'évaluation des acquis scolaires par des situations complexes est la seule pertinente puisqu'elle est la seule à susciter la mobilisation et l'intégration de ressources pour résoudre des problèmes. Même dans une perspective strictement formative, l'utilisation de situations complexes permet d'optimiser le diagnostic des difficultés en permettant de disposer et de traiter des informations non seulement sur la maîtrise ponctuelle d'objectifs spécifiques, mais aussi sur leur mobilisation et leur intégration dans la résolution de problèmes. L'élaboration, l'utilisation et la correction de telles épreuves présentent cependant un ensemble de difficultés qui nécessitent encore de nombreux travaux pour être pleinement résolues. Les difficultés principales tiennent : À la définition claire et précise des paramètres de la famille de situations pour garantir la meilleure équivalence possible entre les différentes situations complexes, même si cette équivalence ne sera jamais totale ; À la définition des critères d'évaluation qui doivent être à la fois pertinents et indépendants ; À la définition des indicateurs et de leur mode de gestion pour apprécier les critères dans un système qui soit à la fois pertinent et faisable ; Au processus de correction des productions des élèves et d'appréciation des critères qui nécessite de la part des correcteurs un détachement par rapport à leurs pratiques habituelles ainsi qu'un travail spécifique pour réduire au mieux l'inévitable désaccord intercorrecteurs. Ces difficultés réelles n'empêchent pas l'élaboration et l'utilisation d'épreuves par situations complexes. Elles invitent à la vigilance et à la recherche de solutions.




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